J’ai récemment posé cette question apparemment étrange sur mon blog car je voulais savoir si d’autres faisaient ce que j’avais l’habitude de faire. Lorsque j’ai eu mes premières aides auditives, je faisais tout pour que ma perte d’audition reste confidentielle. Je ne remplaçais jamais les piles de mes appareils devant les autres.
Avoir mes premières aides auditives a été, pour moi, une étape importante dans ma vie. Je venais tout juste de sortir de ma phase de déni, qui a duré plus d’une dizaine d’années. Plus de dix ans pendant lesquels, malgré une perte auditive modérément sévère, je n’ai jamais porté d’aides auditives. Je m’étais persuadé que j’entendais bien. Je sais que cela est insensé mais c’est ainsi que fonctionne le déni, malheureusement.
Si porter des aides auditives signifiait que cette phase de déni était surmontée et que je reconnaissais mes difficultés, je n’étais pas pour autant prêt à les partager avec le reste du monde. Je n’étais pas prêt à entendre les réactions de mes amis. Qui sait ce qu’ils allaient penser ? Allaient-ils m’exclure de notre cercle d’amis parce que je n’étais plus ‘normal’ ?
Ne sachant pas quelle allait être la réaction des gens, j’ai préféré garder secrète ma perte auditive, quoi qu’il m’en coûte !
De fait, changer les piles est alors devenu pour moi un moment délicat. Si je montrais mes aides auditives – que je m’évertuais à cacher – aux autres, je savais qu’ils allaient me poser des questions.
Voici comment je décris, sur mon blog, l’impact émotionnel d’un tel geste, les premiers temps :
« Les premiers temps où je portais mes aides auditives, lorsque je devais en remplacer les piles, j’allais me cacher. Au tout début, je me réfugiais aux toilettes – publiques ou au travail – pour changer les piles de mes aides auditives. Il m’arrivait aussi parfois de les remplacer au bureau lorsque je pensais être seul dans l’open space. Mais j’étais si stressé à l’idée que quelqu’un puisse revenir et me surprendre que mes mains en tremblaient. Comme si j’essayais de trouver la bonne clé pour entrer chez moi alors qu’une horde de morts vivants était à mes trousses. »
Après avoir écrit l’article, je l’ai partagé sur les pages Facebook de plusieurs communautés malentendantes. Et j’ai pu constater que bon nombre d’utilisateurs d’aides auditives, comme moi, avaient honte de remplacer les piles de leurs appareils en public.
Un de mes lecteurs m’a envoyé un mail pour me dire qu’il était, lui aussi, ce qu’il appelait un « changeur de piles de salle de bains ». Un autre m’a avoué que lorsqu’il ne parvenait pas à trouver des toilettes publiques, il se mettait à chercher un balcon.
Aujourd’hui, je remplace mes piles là où je suis et l’époque des toilettes est révolue…
Lorsque des gens remarquent ce que je fais, ils me posent généralement une question ou deux, plutôt par curiosité que par jugement. Je considère désormais ces questions comme l’occasion de leur rappeler que je n’entends pas bien et qu’ils doivent me parler d’une certaine façon, c’est-à-dire en me regardant, d’une voix forte, distinctement, en captant tout d’abord mon attention, etc.
Quand j’y repense, je suis content que mes années « salle de bains » soient loin derrière moi.
Et vous ? Où remplacez-vous les piles de vos aides auditives ?